Loi Sapin II : quel impact pour les relations commerciales ?

Par Gauthier Moreuil

Définitivement adoptée par le Parlement le 8 novembre dernier, la loi Sapin II faisait l’objet de questions prioritaires de constitutionnalité portant notamment sur son volet relatif aux relations commerciales.

 

Déclarée pour l’essentiel conforme à la Constitution par décision du Conseil constitutionnel en date du 8 décembre, la loi a été promulguée le 9 décembre 2016.

 

Certaines mesures impactent fortement les relations commerciales et doivent être prises en compte dans les négociations qui se sont ouvertes pour 2017.

 

• Convention unique : un, deux ou trois ans

 

Dès 2017, la convention unique qui lie fournisseurs et distributeurs (grossistes ou détaillants) peut être pluriannuelle, dans la limite de trois ans.

 

Lorsqu’elle est conclue pour plus d’une année, elle doit fixer les modalités selon lesquelles le prix convenu est révisé. Ces modalités peuvent prévoir la prise en compte d’un ou de plusieurs indices publics reflétant l’évolution du prix des facteurs de production.

 

 

• Délais de paiement : une nouvelle règle à l’export et des sanctions renforcées

 

Afin d’améliorer la compétitivité des petites et moyennes entreprises françaises à l’export (les grandes entreprises sont exclues du dispositif), le délai maximum de paiement des achats effectués en franchise de TVA de biens destinés à l’export (hors UE) est porté à 90 jours. Le délai convenu ne doit toutefois pas constituer un abus manifeste à l’égard du créancier.

 

Par ailleurs, le non-respect des règles applicables en matière de délais de paiement ou de pénalités de retard est désormais passible d’une amende administrative de 2.000.000 euros pour les personnes morales (contre 375.000 euros auparavant).

 

En outre, les décisions prises en la matière seront systématiquement publiées, ce qui n’était jusqu’alors qu’une possibilité laissée à l’appréciation de l’administration.

 

• Pratiques restrictives de concurrence : deux nouveautés, deux précisions et des sanctions renforcées

 

Deux nouvelles pratiques restrictives de concurrence sont introduites à l’article L.442-6-I du code de commerce et viennent ainsi compléter la liste des clauses que l’on peut qualifier de « noires », puisqu’elles constituent une restriction de concurrence per se :

 

– Imposer dans la convention unique une clause de révision du prix par référence à un ou plusieurs indices publics sans rapport direct avec les produits ou les prestations de services concernés.

 

– Soumettre ou de tenter de soumettre un partenaire commercial à des pénalités pour retard de livraison en cas de force majeure.

 

Par ailleurs, sont désormais expressément visées dans les pratiques susceptibles de créer un déséquilibre significatif, que l’on peut qualifier de clauses « grises » puisqu’elles nécessitent une analyse au cas par cas :

 

– La participation, non justifiée par un intérêt commun et sans contrepartie proportionnée, au financement d’une opération de promotion commerciale.

 

– La rémunération de services rendus par une centrale internationale regroupant des distributeurs.

 

Enfin, les sanctions sont renforcées, l’amende civile maximale passant de 2.000.000 à 5.000.000 euros (rappelons que cette amende peut être portée au triple du montant des sommes indûment versées ou, de manière proportionnée aux avantages tirés du manquement, à 5 % du chiffre d’affaires annuel hors taxes réalisé en France).

 

En outre, le plafonnement du cumul des sanctions en cas d’abus multiples est supprimé et la publication des décisions rendues en la matière sera désormais systématiquement ordonnée.

 

Une fois de plus, le législateur intervient donc pour préserver l’équilibre des relations entre fournisseurs et distributeurs. La forte augmentation des sanctions peut sans doute permettre d’atteindre cet objectif, à condition bien entendu que les contrôles soient effectifs. Il semble bien que telle soit la volonté de l’administration, jusqu’en mai prochain tout du moins…