La nature a horreur du vide, la SAS aussi

Par Nicolas Sidier et Maximilien Mattéoli

Depuis le 1er janvier 2009, les SAS ne sont plus tenues de désigner un commissaire aux comptes dès lors que:

 

 la société ne contrôle pas ou n’est pas contrôlée par une ou plusieurs sociétés, ou

 que ne sont pas dépassés 2 des seuils suivants:

 

– 2 millions d’euros de chiffre d’affaires hors taxe;
– 1 million de total de bilan;
– 20 salariés.

 

La loi LME du 4 août 2008 a ainsi réduit pour la SAS, à l’instar de la SARL, la charge liée à la présence d’un commissaire aux comptes (entre 1.500 et 5.000 euros par an pour les petites sociétés) rendant par là-même la SAS particulièrement attractive pour les entrepreneurs.

 

Ce faisant, le législateur a créé un vide juridique: la présence d’un commissaire aux comptes est en effet prévue par certains textes relatifs à la société anonyme auxquels renvoie de manière générale l’article L 227-1 du Code de commerce relatif à la SAS.

 

Il en va ainsi notamment des attributions gratuites d’actions aux salariés ou des émissions d’actions en cas de suppression du droit préférentiel de souscription, opérations qui nécessitent l’établissement préalable d’un rapport du commissaire aux comptes.

 

Que faire alors lorsque la SAS n’a pas de commissaire aux comptes désigné?

 

La prudence élémentaire commanderait de recourir systématiquement à un commissaire aux comptes ad hoc dès lors que l’opération envisagée requiert pour la société anonyme la présence d’un commissaire aux comptes.

 

Cependant, cela aboutit à nier la nature propre de la SAS, caractérisée par sa souplesse et son adaptabilité.

 

La solution inverse consisterait alors à reconsidérer le texte de l’article L.227-1 du Code de commerce qui dispose que les règles de la société anonyme sont applicables aux sociétés par actions simplifiée, « dans la mesure où elles sont compatibles avec les dispositions particulières » propres à la SAS: lorsqu’une SAS n’a pas fait le choix d’un commissaire aux comptes, les textes de la société anonyme prévoyant l’intervention d’un commissaire aux comptes seraient ipso facto incompatibles avec les dispositions particulières de la SAS.

 

Entre deux solutions extrêmes, la solution médiane semble toujours la plus juste.

 

L’enjeu de la présence ou non d’un commissaire aux comptes est la qualité de l’information délivrée aux associés (vérification des conditions de prix, composition de l’actif, effet dilutif, etc.).

 

C’est donc au dirigeant de la SAS, qui engage sa responsabilité sur la qualité de l’information qu’il délivre, qu’il appartient de faire le choix du recours à un commissaire aux comptes dès lors que celui-ci serait seul à même de rassembler et de présenter l’ensemble des éléments d’information délivrés aux associés.

 

On pourra supposer que la présence du commissaire aux comptes sera alors requise en cas d’acompte sur dividende, l’article L232-12 du Code de commerce imposant un bilan certifié.

 

On pourra supposer le contraire lorsque par exemple il ne s’agira pour le dirigeant de la SAS que de présenter un rapport sur la suppression du droit préférentiel de souscription.

 

En tout état de cause, pour mettre fin à toute incertitude, on ne peut qu’espérer que le législateur intervienne pour que les cas où la présence des commissaires aux comptes au sein de la SAS est requise soient clairement définis.

 

En attendant, il semble que la sanction encourue au cas où la jurisprudence viendrait à considérer qu’un rapport de commissaire aux comptes est nécessaire se place davantage sur le terrain de la responsabilité, qui implique l’existence d’un préjudice, que de la nullité.