Affaire Grimbergen : la Cour d’appel de Paris rejette les demandes de l’ANPAA

Par Eric Andrieu

Kronenbourg était poursuivie pour trois films diffusés sur Internet au profit de la marque Grimbergen ainsi que pour l’utilisation du slogan « L’intensité d’une légende ».

 

Une condamnation avait été prononcée par le Tribunal de grande instance de Paris.

 

Par un arrêt du 13 décembre, la Cour d’appel de Paris infirme le jugement du Tribunal et rejette l’ensemble des demandes de l’ANPAA.

 

Pour l’essentiel, la Cour retient :

 

(i)   qu’une publicité peut être incitative,

 

(ii)  que l’objectivité n’est un critère obligatoire pour la publicité des alcools qu’au regard de la couleur et des caractéristiques olfactives et gustatives,

 

(iii) que la communication sur Internet permet d’utiliser les différentes technologies permises par ce support.

 

Plus précisément, la Cour indique que :

 

– « Seule l’incitation à une consommation excessive contrevenant à l’objectif de santé publique de lutte contre l’alcoolisme défini par le législateur » est interdite.

 

– La communication sur les autres éléments que les caractéristiques olfactives et gustatives doit « laisser la place à l’imagination des concepteurs des messages publicitaires ».

 

La Cour reproche à l’ANPAA de reprendre certains éléments en les sortant de leur contexte et constate que les différents éléments poursuivis sont tous conformes à la loi Evin :

 

– Le film « La légende du phénix » est une communication « sur l’origine des produits au travers de l’Abbaye de Grimbergen dont la devise et l’emblème le phénix sont des éléments distinctifs de sa marque figurant sur son produit sans que l’ANPAA en conteste la légalité; qu’il est justifié des liens historiques du produit avec l’Abbaye de Grimbergen mais également de ses liens actuels » et que « l’origine du produit peut être historique ou géographique et ne peut pas être limitée à son territoire actuel de production ».

 

La Cour admet qu’un « récit narratif évoquant en premier lieu ce qu’a été à travers les âges le phénix, emblème de la marque et dont la société Kronenbourg peut faire usage dans sa communication n’altère nullement le fait que le contenu du message porte sur l’origine du produit ».

 

Elle admet également la validité de la conclusion : « Une bière au caractère unique est née de cette Abbaye et de son histoire légendaire » tout en rejetant les affirmations non justifiées de l’ANPAA évoquant le mode de vie élitiste, le pouvoir extraordinaire du phénix ou encore la consommation d’alcool comprise comme une aide pour surmonter la normalité et ses problèmes.

 

– Pour le film « Les territoires d’une légende », la Cour admet la présentation du phénix, de l’abbaye et des éléments qui s’y trouvent en relevant une nouvelle fois que l’objectivité n’est pas indispensable.

 

Elle constate que la référence à « Game of Thrones » n’est pas établie et qu’elle ne serait pas nécessairement illicite.

 

– Pour « Le Jeu des territoires », la Cour constate qu’il est fait référence à l’origine et à la composition des bières ainsi qu’à leur couleur et à leur goût, ce qu’elle considère comme autorisé.

 

Elle admet le caractère ludique de la communication et considère que « dès lors qu’il ne constitue pas une incitation à une consommation excessive d’alcool, le jeu n’est pas illégal. »

 

– Quant au slogan « L’intensité d’une légende », la Cour constate qu’il renvoie à « l’intensité des arômes » et à « la légende de la marque née en 1128″, ce qui constitue « une référence explicitée et objective aux caractéristiques gustatives du produit et une référence à ses origines ».

 

Elle autorise donc l’utilisation de ce slogan sur tous supports.

 

En conséquence, la décision de première instance est infirmée, les demandes de l’ANPAA rejetées et celle-ci est condamnée à payer à Kronenbourg une somme de 6.000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.