Sous-locations Airbnb : condamnation du locataire à restituer au propriétaire les loyers perçus

Par Aurélie POULIGUEN-MANDRIN et Alice ANGELOT

Depuis la création d’Airbnb et d’autres plateformes de ce type, les juridictions tentent d’encadrer ce qu’il est convenu dorénavant d’appeler l’ubérisation du logement afin de dissuader les locataires de mettre leur résidence en sous-location via ces sites internet.

 

Par plusieurs décisions[1], les tribunaux d’instance parisiens ont choisi de sanctionner les locataires qui concluaient des sous-locations de leurs appartements, en prononçant régulièrement la résiliation des baux et en s’attaquant à leur porte-monnaie.

 

En l’espèce, des locataires avaient sous-loué leur appartement sur la plateforme Airbnb pendant plusieurs années sans l’accord du propriétaire, et ce dernier sollicitait leur condamnation à lui restituer les sous-loyers perçus.

 

Le propriétaire soutenait que les sous-loyers réglés par les sous-locataires au locataire, au titre des baux de courte durée consentis via Airbnb, constituaient des « fruits civils », qui par nature reviennent au propriétaire en vertu des articles 546 et 547 du Code civil.

 

Le tribunal d’instance, puis la Cour d’appel de Paris, s’étaient prononcés en faveur de cette interprétation[2], considérant que la mise en sous-location d’un bien produit de nouveaux fruits civils qui ne sont susceptibles de rester acquis au locataire, qu’en cas de bonne foi.

 

Or, le locataire ne pourra pas être considéré de bonne foi lorsque la sous-location est faite en violation des stipulations du bail l’interdisant. De ce fait, les locataires ont été condamnés à restituer l’intégralité des sous-loyers perçus au propriétaire, soit la somme de 27.295 €.

 

Les locataires ont saisi la Cour de Cassation qui a confirmé la décision de la Cour d’appel de Paris par un arrêt du 12 septembre 2019 appelé à une très large publication et qui figurera au rapport annuel de la Cour[3]. La Cour de cassation entérine le raisonnement des juridictions du fond en indiquant que « sauf lorsque la sous-location a été autorisée par le bailleur, les sous-loyers perçus par le preneur constituent des fruits civils qui appartiennent par accession au propriétaire ».

 

Ainsi, sans l’accord exprès du bailleur quant à la mise en sous-location du bien, le locataire n’est pas possesseur de bonne foi des sous-loyers qu’il doit reverser au bailleur.

 

Cette interprétation pourra être transposée pour différents types de sous-locations puisque les dispositions en matière de baux commerciaux et de baux ruraux prévoient eux aussi l’illicéité de la sous-location en l’absence d’accord exprès du bailleur[4].

 

[1] TI Paris 6 avril 2016, n°11-15000294 ; TI Paris 24.10.2018, n°11-18-211247, TI Paris 06.02.2018, n° 11-17-000190

[2] CA Paris, 5 juin 2018, n°16/10684

[3] Civ. 3ème, 12 septembre 2019, FS-P+B+R+I, n°18-20727

[4] Article L.145-31 du Code de commerce ; Article L.411-35 Code rural et de la pêche maritime