Réforme du contentieux de la sécurité sociale et de l’action sociale : ce qui change à compter du 1er janvier 2019

Par Julie De Oliveira et Ludivine Polesso

Le contentieux de la sécurité sociale et de l’action sociale relève actuellement de la compétence de trois juridictions judiciaires de première instance.

 

Tout d’abord, le Tribunal des affaires de sécurité Sociale (TASS) statue sur les litiges relatifs au contentieux général, à savoir notamment les dossiers en matière d’accidents du travail et de maladies professionnelles (AT-MP), ainsi que les actions en reconnaissance de faute inexcusable, mais également les procédures en recouvrement initiées par la CAF, la CPAM ou encore l’URSSAF.

 

Le Tribunal du contentieux de l’incapacité (TCI) connaît, quant à lui, du contentieux technique qui recouvre notamment les questions relatives au taux d’incapacité en cas d’accident ou de maladie.

 

Enfin, la Cour nationale de l’incapacité et de la tarification de l’assurance des accidents du travail (CNITAAT) traite, en premier et dernier ressort, du contentieux de la tarification des accidents du travail.

 

    • Mais la loi de modernisation de la justice du XXIe siècle du 18 novembre 2016 (loi 2016-1547 du 18 novembre 2016, art. 12 et 114, JO 19 nov) ainsi que le décret d’application du 4 septembre 2018 (décret n° 2018-772, JO 6 sept.) sont venus entreprendre une réforme d’ampleur.

 

Cette réforme prévoit ainsi la suppression des trois juridictions de sécurité sociale précitées, au plus tard au 1er janvier 2019.

 

Les juridictions du contentieux général de la sécurité sociale, du contentieux de l’incapacité et de l’aide sociale seront supprimées à compter du 1er janvier 2019, date à laquelle le contentieux relèvera, dans l’ordre judiciaire, de TGI et de cours d’appel spécialement désignés, et dans l’ordre administratif, des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel.

 

Ainsi, les cent quinze TASS et les vingt-six TCI seront fusionnés et intégrés dans un pôle social au sein de tribunaux de grande instance (TGI) spécialement désignés et l’appel sera porté devant des cours d’appel spécialement désignées pour le contentieux général et le contentieux technique (hors AT-MP).

 

Par ailleurs, les commissions départementales et centrales d’aide sociale (CDAS et CCAS) disparaitront également au profit des TGI spécialisés ou des juridictions administratives de droit commun.

 

La CNITAAT sera également supprimée ; seule la cour d’appel d’Amiens connaîtra, en premier et dernier ressort, des litiges relatifs aux questions de tarification des AT-MP.

 

Toutefois, si les affaires nouvelles seront traitées par la cour d’appel d’Amiens, la CNITAAT demeurera compétente pour poursuivre la mise en état et le jugement des affaires en cours au 31 décembre 2018 et ceci, jusqu’au 31 décembre 2020 ou à une date ultérieure à fixer par décret qui ne pourra dépasser le 31 décembre 2022.

 

      • Un décret du 29 octobre 2018 (décret n°2018-928, JO 30 oct.) a posé la dernière pierre à l’édifice en fixant les dispositions procédurales applicables au contentieux de la sécurité sociale et de l’aide sociale à compter du 1er janvier 2019.

 

Compte tenu de la modification des juridictions compétentes en matière de contentieux de la sécurité sociale, ce décret aménage notamment la transition entre les juridictions supprimées et celles nouvellement compétentes.

 

Ainsi, les procédures en cours devant le TASS ou devant le TCI seront transférées au TGI dans le ressort duquel était situé le siège de la juridiction supprimée, le justiciable devant en être informé par les secrétariats des tribunaux concernés.

 

Au stade de l’appel, seront compétentes pour connaitre des appels contre les décisions rendues par les juridictions supprimées, les cours d’appel spécialement désignées dans le ressort duquel était situé le siège du TASS ou du TCI qui a rendu la décision attaquée.

 

Bien que la procédure reste orale, le décret du 29 octobre 2018 prévoit néanmoins la possibilité pour les parties de formuler leurs prétentions et leurs moyens par écrit sans se présenter à l’audience.

 

Le président de la formation de jugement au TGI exercera des pouvoirs reconnus au juge de la mise en état sans qu’il n’y ait de délais impératifs.

 

Concernant la procédure d’appel, elle pourra se faire sans représentation obligatoire et les décisions de la cour seront notifiées aux parties par le greffe.

 

Il conviendra d’être particulièrement vigilant afin d’anticiper au mieux la mise en place de toutes ces dispositions dès le 1er janvier 2019.

 

En pratique, pour faciliter l’application de la réforme, sur le dernier trimestre 2018, de nombreuses affaires ont été renvoyées par des TASS souhaitant éviter les difficultés liées à des audiences de plaidoirie tenues en 2018 devant la juridiction actuellement compétente mais donnant lieu à des jugements notifiés seulement en 2019 par la juridiction nouvellement désignée.

 

A suivre donc…